Lettre ouverte du président de l’association des tunisiens de France à monsieur le ministre aux décisions irrefléchies
En tant que président de l’association des tunisiens de France ATDF (www.tunisiensdfrance.org), j’ai exprimé lors de la journée des tunisiens à l’étranger en août dernier au ministre, les raisons de mon désaccord sur la suppression des cours arabe pour les enfants tunisiens à l’étranger et les solutions pour y remédier.
Depuis 2003 plus de 2000 enfants jeunes et adultes ont suivi les cours d’arabe dans notre association. Malgré l’expertise acquise par notre association dans ce domaine, personne ne nous a demandé de donner notre avis pour mieux analyser la situation et éviter de prendre des décisions qui seront sur moyens et longs termes catastrophiques pour la communauté et pour la Tunisie.
Certes on pourrait estimer que l’enseignement de la langue arabe à l’école publique française est une mise en valeur pour notre langue et culture…, mais attention et je redis attention !!!
Il faut savoir lire entre les lignes et dans les arrières pensées de cette politique, qui est bien appuyée par nos élites et politiques tunisiens et à leur tête Néji Jelloul, notre célébrissime ex ministre de l’éducation qui paraissait servir uniquement les intérêts du pays et de l’intérêt général avec toute abnégation.
Mais malheureuse une affaire qui et méconnue par la population, prouve comme le dirait le proverbe tunisien ” qu’il n’y a pas un chat qui chasse pour le compte du bon dieu”. Notre Jelloul national, ‘’soucieux des intérêts de la patrie’’, et à l’initiative du projet de suppression des cours d’arabe pour les enfants de la communauté tunisienne à l’étranger, ne se souciait clairement pas des intérêts du pays ou des enfants de la communauté et le peu de liens qui les attachent avec le pays d’origine, tant que cette décision servirait son projet d’école privée pour l’apprentissage de la langue arabe en France.
Donc nul, ni notre élite du pays, ni nos politiques ‘’émérites’’, sans évoquer nos députés du peuple qui ne se rendent toujours pas compte qu’ils sont élus par le peuple et non par leurs partis politiques, n’ont mesuré le conflit d’intérêt que présentait a décision de Jelloul de supprimer les cours d’arabe pour la communauté à l’étranger, qui sont assurés jusqu’à lors et depuis des décennies pour donner aux enfants de la communauté tunisienne à l’étranger un lien avec la culture et pays d’origine.
Revenons aux vices cachés des cours d’arabe à l’école publique en France.
La France qui depuis plus de 60 ans, malgré les différentes politiques d’immigration et d’intégration qui se sont succédées, n’a pas réussi à assimiler entièrement les immigrés dans le moule préalablement défini pour faire de ‘’bons citoyens’’. Les enfants d’immigrés de deuxième, troisième et quatrième génération qui sont souvent français par le droit du sol, restent malgré tout attachés à leur culture et pays d’origine et n’hésitent pas à l’affirmer ouvertement à chaque occasion qui se présente. Les conjonctures sociales et politiques internationales actuelles, les rendent plus visibles et problématiques, face à une opinion publique qui banalise de plus en plus la radicalisation et le patriotisme extrême. Tous les rapports et études sociologiques sur cette frange de la population se concordent sur’’ l’amnésie des origines’’ ou le qui suis-je et d’où je viens ??’’ qui serait le meilleur outil qui permettrait l’assimilation et l’intégration des générations héritières de l’immigration. Donc pour simplifier cette orientation subliminale des politiques d’intégration futures qui feront de ces enfants d’immigrés de bons citoyens, il faut provoquer chez eux une amnésie de toute attache à leur culture, pays d’origine ou langue…
Pour tout dire, au-delà de la valorisation de façade de notre culture d’origine et notre langue, l’enseignement de l’arabe dans l’école publique française, permet entre autres de maitriser le dosage progressif de la perfusion de l’antidote pour le mal qui empêchait l’atteinte des objectifs cachés des politiques d’intégration. Les souvenirs de la patrie d’origine sont des obstacles pour la maternité de la patrie adoptive.
Mais où est le mal dans tout cela et qui sont les perdants dans l’histoire ??
Quand le malheur des uns fait le bonheur des autres !
Cette ‘’amnésie des origines’’ ne pourrait être que bénéfique sur long terme pour la France ou toute patrie adoptive, qui face au vieillissement inéluctable de sa population autochtone, ne peut se passer de ce vivier de population jeune qui pourrait faire des bons citoyens adoptifs et amnésiques.
Mais comment les pays d’origines comme la Tunisie seront les grands perdants ?
Les apports économiques des enfants du pays expatriés ne sont pas moindre pour l’économie du pays. Pour donner l’exemple de la Tunisie, le petit pays des 11 millions d’habitants avec presque 13%de sa population recensée résidante à l’étranger. Selon les données de l’office des tunisiens à l’étranger (OTE), les tunisiens à l’étranger recensés sont 1.326.000, la communauté la plus importante réside en France et représente environ 54% des tunisiens à l’étranger. Sans prendre en considération, les clandestins très nombreux, et dont le nombre exacte est difficile à définir, ainsi certains binationaux dont il est difficile de recenser, qui n’ont pas jugé nécessaire d’enregistrer leurs progénitures aux registres consulaires et ce pour X raisons
Selon l’OTE, l’apport économique des tunisiens résidents à l’étranger, reste l’une des ressources principales du développement économique du pays avec une augmentation annuelle de 8,9%.
Quatrième source de devises pour la pays, ceux sont 3984 millions de dinars tunisiens de virements monétaires de la communauté tunisienne vers le pays, 88% de ces ressources en une provenance des tunisiens en Europe, surtout la France.
Ce vivier de ressources qui constitue de l’oxygène pour l’économie du pays ont permis depuis 1992, d’après les données de l’OTE, la réalisation de 18929 projets, la création de 57380 postes de travail et un investissement global évalué à 796,260 millions de dinars.
Et que deviendrait la Tunisie si elle perdait cette bouffée d’oxygène jusqu’à lors garantie par ses enfants à l’étranger ???
En réussissant l’antidote pour la perfusion qui sera administré au futurs bon citoyens amnésiques issus de l’immigration, la France ou toute patrie adoptive qui appliquerait cette politique, ne pourront que se satisfaire d’avoir réussi la création de la génération de bons citoyens sans origines et amnésiques. Bien sûr il y aura des cours d’arabe dans les écoles publiques mais avec quels contenus ?? les enfants apprendront certainement à lire et écrire l’arabe, mais qu’on est-il du contenu culturel et de la richesse de la culture du pays d’origine ?? Ce sera certainement le dernier des soucis des enseignants qui seront certainement des autochtones et qui ne pourraient rien transmettre aux enfants d’origine étrangère de l’héritage, de l’histoire ou la civilisation du pays d’origine de leurs parents.
Ses enfants sans histoire et dont l’ADN des origines serait éradiquée d’ici quinze à vingt années de cette nouvelle politique d’intégration, perdront tout lien avec les pays de leurs parents et grands-parents, ne sentiront plus l’utilité d’envoyer de l’argent à un pays pour lequel ils ont été dépourvu de tout sentiment, de liens et d’appartenance.
Alors messieurs les politiques tunisiens, comment prévoyez-vous le remplacement de cette perte de ressource principale de l’économie tunisienne ? Compter sur la providence ne présagera pas un bel avenir au pays, et si les enfants expatriés du pays deviendraient amnésiques par perfusion et ne serviraient plus le pays, ce n’est pas compter sur l’argent qatari ou émirati qui sauvera le pays si jamais ces deux pays existeraient encore et serait toujours prospères dans quelques décennies ??
Un conseil de tunisiens qui vivent à l’étranger et qui ont peur pour l’avenir de leur Tunisie. Nous vous demandons de renforcez les cours d’arabe par des apports culturels développer une politique du développement de l’apprentissage des cours d’arabe et du devoir de la transmission culturelle entre les générations, dans les associations tunisiennes à l’étranger. Soyez citoyens dignes et transcrivez dans la constitution tunisienne le devoir de transmission de la culture et de l’histoire du pays à tout tunisien partout où il se trouvera dans le monde. Développez le conseil national du devoir de la transmission de la culture inter générations et de la citoyenneté participative. Voici quelques pistes de travail que nous vous conseillons pour sauver notre Tunisie.
A Bon entendant
Le président de l’association des tunisiens de France ‘’ATDF’’
Mohsen ZEMNI
Notre force c’est Vous
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